mercredi 22 février 2017

Tout feu tout flamme




Ma fille grandit. Évidemment.
Comme le dit le poète : « Mais bien sûr que je grandis que veux-tu que j’fasse d’autre ? / évidemment qu’je grandis j’vais pas r’dev’nir petit ! » (*)
Ne cherchez pas, non : si vous n’avez pas d’enfants âgés de moins de seize ans, il est probable que vous ne connaissiez pas. Mais ça confirme que ma fille a bien grandi, en tout cas, vu qu’elle a probablement déjà oublié qu’elle avait aimé cette chanson un jour.

Tout ça pour dire que, puisqu’elle grandit, elle gagne bien sûr en autonomie et en maturité. Bon : une autonomie qui ne s’étend quand même pas à la cuisine ou à la lessive et une maturité qui n’inclut pas du tout la conscience aigüe de la nécessité de faire ses devoirs et de ranger sa chambre, mais disons qu’elle a une autonomie suffisante pour aller seule aux toilettes si je ne suis pas là et la maturité nécessaire pour savoir qu’on ne joue pas à mettre les doigts dans les prises de courant. Ce qui n’est déjà pas si mal.
Autant de qualités qui, immanquablement, m’ont amenée à la laisser seule à la maison. D’abord le temps d’aller chercher le courrier, puis le pain, puis… je vous passe la longue et, il est vrai, assez peu intéressante liste des étapes par lesquelles nous sommes passées pour en arriver à ce jour où je l’ai finalement laissée seule à la maison pour sortir… le soir.

C’est très différent de la journée, le soir. Le soir, il fait noir et le noir, ça fout la frousse. Aux enfants. Et même aux pré-ados. À ceux qui restent seuls à la maison pour la première fois, en tout cas. Alors bien sûr, même si j’avais confiance et tout, je n’étais pas super sereine quand même et je n’ai pas attendu très longtemps avant d’envoyer un sms à ma fille chérie :

Tout va bien ? *smiley mignon* qui montre que maman s’intéresse – pas *smiley bleu de peur* qui montre que maman flippe.

Réponse rapide de fifille chérie :

Oui *smiley pouce en l’air*
Y a juste un peu le feu dans la cuisine *pas de smiley*

Bon. Quand on connaît ma fille, on peut facilement imaginer qu’il s’agit d’une blague. Mais quand on est sa mère et qu’on n’est pas là et qu’il fait nuit et qu’on s’inquiète, pendant un moment, on doute.
Elle a fait durer le moment exactement huit minutes, avant d’envoyer un nouveau message laconique :

lol

Même si je n’étais pas véritablement paniquée, le soulagement a sans doute contribué à ce que je ne lui envoie pas directement les pompiers pour qu’elle leur explique son sens de l’humour et je me suis même fendue d’une réponse *smiley qui rigole en tirant la langue*.
Je suis assez cool, comme mère.

La deuxième fois que je l’ai laissée seule le soir, à ma question :

Ça va ?

Elle a répondu :

Oui
La télé a explosé mais tkt je gère

Et quelques minutes plus tard :

*smiley qui pleure de rire*

J’ai eu droit au même genre de blague… un certain nombre de fois.
Évidemment, à force, je m’y attendais, mais les mères angoissées sont ainsi faites qu’elles ne peuvent totalement contenir leur inquiétude tant que le *smiley qui rit* ou le *loooool* ne sont pas venus confirmer que la blague était bien une blague. Et puis y a cette histoire, là, vous savez, du gamin qui criait au loup…
J’ai eu beau expliquer à fifille chérie qu’on avait bien ri, mais que maintenant elle n’était peut-être plus obligée de me refaire rire à chaque fois, elle a persisté.

Alors un jour où elle avait sans doute dû m’agacer – parce que sans ça, comme je l’ai déjà précisé, je suis assez cool, comme mère – j’ai eu envie de lui donner une petite leçon. Je suis sortie en lui faisant mes consignes habituelles (auxquelles j’avais depuis quelque temps déjà intégré l’injonction de ne pas faire la blague de l’incendie) et, avant de partir, pour qu’elle comprenne une bonne fois pour toute que la question était sérieuse, j’ai allumé une bougie sous le rideau du salon.

Après coup, je me rends compte que la leçon aurait probablement été plus efficace si elle avait survécu.




(*) « Bien sûr que je grandis » de Zut, un groupe que je conseille à toutes les petites oreilles à partir de 3-4 ans.

2 commentaires:

  1. Tout ça c'est bien sûr la faute à Amnesty International et à ses bêtes bougies !

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  2. Sans compter qu'avec leurs histoires de droits de l'homme et tout, on peut plus coller une bonne baffe tranquille à ses gosses, alors on est obligé de se casser la tête à trouver le moyen de les éduquer quand même...

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